Poursuivi l'an dernier en Russie pour "extrémisme", un chef d'inculpation passible de plusieurs années de prison, Konstantin Altounine
ne sait pas où en est la procédure: "Cela ne m'intéresse plus. Maintenant, ma vie est en France".
En août 2013, des policiers russes armés de kalachnikov avaient saisi
quatre de ses toiles exposées dans un musée privé de Saint-
Pétersbourg, dont l'une représentait un Vladimir Poutine en nuisette,
coiffant les cheveux d'un Dmitri Medvedev doté d'un corps de femme
voluptueux en sous-vêtements.
KONSTANTIN ALTOUNINE - Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev
© Musée du pouvoir
Ce travestissement était "de la satire, pas de l'extrémisme", qui
symbolisait l'échange des fonctions de Premier ministre et de
président entre les deux hommes en 2012, estime le peintre.
Craignant d'être interpellé, il s'était
promptement envolé pour Paris
"avec à peine une brosse à dents" et avait demandé l'asile en France.
Sa femme et sa fille l'ont rejoint quelques
semaines plus tard.
"Il avait une grande notoriété en Russie, il vendait ses toiles très cher.
Tout ça s'est écroulé. En France, sa cote est repartie de zéro. Il a dû
baisser ses prix, mettre son orgueil de côté", raconte Caroline Barthélémy,
de la galerie parisienne La Valse, qui l'a exposé cette
année.
Mais de ses déboires en
Russie, Konstantin Altounine assure qu'il "ne
regrette rien": "Si c'était à refaire, je le referais. Un peintre doit être
libre pour être un miroir de son époque". Dès son arrivée en France, "il
s'est mis à avoir une production frénétique", peut-être "par
rage"
d'avoir perdu ses tableaux restés en Russie, relève Mme Barthélémy.
S'il a poursuivi un temps sa série corrosive sur le tandem au pouvoir à Moscou,
grimant par exemple un Poutine glacial en "saint" avec ailes et auréole, le peintre, qui ne se voit pas comme un "artiste à scandale", traite aujourd'hui d'autres sujets.
Tantôt
grises et d'un académisme trompeur, tantôt zébrées de coulures bariolées, ses toiles peuvent mettre en scène des réfugiés de Syrie, des primates d'une confondante humanité ou encore des
poètes qu'il admire comme Baudelaire, Verlaine ou Limonov.