Le processus d’auto-destruction de l’Occident est en route

 

 

Après le 11 Septembre 2001, le monde a changé pour le pire.

Nous avons clairement constaté son changement dans les aéroports. Le contrôle des passagers, ressemblant comme deux gouttes aux fouilles pénitentiaires, est devenu routinier. Vous en avez sûrement tous fait l’expérience et je ne vais pas vous expliquer ce que vous savez déjà.

Le monde est devenu globalement moins démocratique. Depuis la tragédie du 11 septembre, La police est bien plus présente et les pratiques totalitaires augmentent. Partout : aux États-Unis, et dans la vieille, mais inconsciente Europe.

Les Etats-Unis, afin de punir quelqu’un pour le crime du 11 septembre, ont envahi l’Afghanistan, qui vivait tranquillement dans sa version plutôt pacifique du Moyen-Age, sous prétexte que l’Afghanistan abritait Ben Laden, et que ce trublion saoudien avait organisé les attaques terroristes de New York. Personnellement, je pense que Ben Laden, le suffisant leader d’Al-Qaida, s’est simplement contenté de s’attribuer le mérite du plus grand acte terroriste de l’histoire.

Nous avons tous vécu ces 14 dernières années dans une ambiance de libertés décroissantes avec des aspects de non-liberté très semblables aux pratiques décrites dans le livre de George Orwell « 1984 » de plus en plus enracinés dans nos vies. Pas encore le fascisme, mais un type particulier de totalitarisme – généré par la peur, bien sûr – mais cela ne rend pas la chose plus facile.

Pour compenser la limitation des libertés politiques des citoyens et la mise en place de pratiques carcérales, l’Europe et les États-Unis se sont mis, de manière suspecte, à insister sur les droits secondaires de l’individu.

Je veux dire que l’engouement général de nos gouvernements européens et étasuniens pour les amours de même sexe, les mariages de même sexe, de leur emballement dégoulinant d’humanité pour les droits des personnes handicapées et l’adoption des enfants malades et étrangers, etc. – la liste est longue – va de pair avec le durcissement de la vie politique dans l’Ouest et l’augmentation des pouvoirs de police.

C’est comme cela que ça s’est passé jusqu’à ces dernières années. 2013, 2014 et 2015 nous ont apporté de nouvelles surprises. Et il y en aura d’autres. L’Europe est confrontée à un choix : soit devenir activement nationaliste avec des aspects nazis et fascistes, soit changer du tout au tout. Le problème de l’invasion de migrants vers l’Europe est le pire défi de l’Europe de toute son histoire.

Quelle est la situation?

En raison de la politique de prédation des Etats-Unis et de l’Europe, le système étatique de plusieurs pays importants s’est désagrégé. L’Afghanistan, l’Irak, la Libye – et pour finir la Syrie – ont été attaqués par l’Occident. Les guerres soi-disant pour les «droits humains», les conflits armés menés par l’Occident, étaient et restent des agressions, seulement recouverts de l’habillage moderne des droits humains pour dissimuler leur essence cannibale. L’Afrique est déstabilisée, directement ou indirectement, les affrontements entre les «bons» et les «mauvais» qui font rage dans plusieurs pays africains – le Mali, en est l’exemple le plus flagrant – ont aussi détruit leurs systèmes étatiques.

L’Ukraine a détruit son Etat apparemment toute seule, mais n’y a-t-elle pas été encouragée par les Américains, les Polonais, les Néerlandais, les Allemands, les Finlandais, les Français, les Baltes, qui sont venus parler aux Ukrainiens sur  le Maïdan? Et donc il faut ajouter l’Ukraine aux nombreux états détruits. Les Européens et les Yankees ont monté systématiquement le Maidan contre la Russie. C’est intéressant de constater que  bien que la Russie ne soit plus un pays communiste, ni soviétique, ils continuent de nous haïr avec la même violence. Il est donc clair maintenant, du moins je l’espère, que l’anti-communisme et l’anti-soviétisme ne servaient qu’à camoufler leur russophobie.

Et maintenant les peuples et les tribus fuient leurs pays dévastés.

Pour aller où?

Les côtes américaines sont loin, les bateaux fragiles ne peuvent pas traverser l’océan.

Et l’île italienne de Lampedusa n’est qu’à quelques encablures de la côte ravagée de la Libye. Et la Grèce est proche.

ISIS a beau être riche, terrifiant et rusé, il n’a pas les moyens d’organiser l’exode d’un nombre incalculable de réfugiés. Je ne crois pas un seul instant que  ces démons de l’enfer aient envoyé des centaines de milliers de réfugiés vers l’Europe. Ce n’est pas ISIS.

La plupart de ceux qui déferlent sur l’Europe sont des hommes jeunes parce que les hommes ont plus de force que les femmes et les enfants, ils peuvent surmonter les difficultés et les souffrances d’un voyage par-delà trois mers vers le cœur de la riche Europe – la riche Allemagne.

Qui fuit la guerre, qui fuit la ruine et la pauvreté, qui fuit les conséquences de la guerre ? Il est difficile de faire le tri. Et même le plus grand professeur à la Sorbonne n’en est pas capable. Car les trois sont vrais.

C’est vous, Européens et Américains, qui avez donné un coup de pied dans la fourmilière, alors de quoi vous plaignez-vous ? Tout cela est votre faute! Pour que les migrants n’affluent pas chez vous, il faudrait rendre leurs conditions d’accueil insupportables. Mais vous ne le ferez pas. Pas parce que vous êtes bons, vous n’êtes pas bons, mais parce qu’il est important pour vous de donner une bonne image, une image humanitaire, après vous être lavés les mains dans le sang des citoyens des Etats qui vous avez mis en pièces.

Comme le 11 septembre 2001, les migrants (les images de la gare à Budapest sont frappantes et fortes, parce que c’est le Moyen-Orient, l’Asie et l’Afrique qu’on voit sur les photos et les vidéos, pas l’Europe) vont tellement changer le monde qu’on ne le reconnaîtra plus. Ils le changent déjà.

De deux choses l’une, soit en fin de compte les gens auront, en Europe, une autre religion, des yeux noirs et la peau sombre. Cela n’a rien à voir avec le racisme, (au cas où on serait tenté de m’en accuser), mais les citoyens de l’Allemagne ressembleront aux citoyens du Moyen-Orient. Soit on aura des Etats fascistes et racistes, retranchés derrière des barbelés, des murs et des mitrailleuses. Il n’y a pas de troisième solution.

Je viens d’apprendre qu’en Russie il y a 2,5 millions de réfugiés venus d’Ukraine (ou plutôt, 2 503 680 personnes), mais on ne peut pas les  distinguer des Russes. Donc, l’assimilation ne nous menace pas. Nous aurons les mêmes yeux, la même peau, la même religion. Les Ukrainiens n’auront pas de problème pour s’intégrer. Nous sommes dans une meilleure situation que la malheureuse Europe, vouée à perdre la forme qui a été la sienne pendant un demi-millénaire.

Cela me fait de la peine. Je préfère garder la vieille Europe. Mais puisqu’il semble qu’on n’ait pas le choix et que de toute façon l’Europe est hostile à la Russie, eh bien qu’elle disparaisse !

Le processus d’auto-destruction de l’Occident est déjà irréversible. Comme disait Gorbatchev : « Le processus est en route ».

Nous avons assisté à l’auto-destruction de l’URSS. Maintenant, c’est le tour de l’Europe. Chacun à sa manière.

                                     Edouard Limonov | 12.09.2015

 

 

Article original: http://fortruss.blogspot.fr/2015/09/eduard-limonov-europes-self-destruction.html

Traduit du russe par Kristina Rus et de l’anglais par Dominique Muselet

Source: http://arretsurinfo.ch/limonov-lautodestruction-de-leurope-est-irreversible/